Razzia auf Mont-Dedos - Descente de police au Mont-Dedos

« Nous avons entendu un bruit assourdissant, puis nous avons vu des policiers armés et accompagnés de chiens encercler la maison. La famille congolaise Musey a été emmenée et n'a jamais été revue. Nous n'avions dit à personne que nous hébergions des immigrés clandestins, pas même à nos voisins les plus proches. »

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Le Mont-Dedos – et l’affaire Mathieu Musey

Dora Burkhalter n'est pas près d'oublier ce matin du 7 janvier 1988, alors que des policiers débarquent avec armes et hélicoptère à la ferme du Mont-Dedos: «Nous avons entendu un bruit assourdissant, puis nous avons vu des policiers armés de fusils avec des chiens qui encerclaient la maison. J'ai cru que c'était la guerre. Puis les Musey ont été emmenés et on ne les a plus jamais revus. Nous n'avions dit à personne que nous hébergions des clandestins, même à nos voisins les plus proches. Moi-même, j'ai longtemps ignoré qu'il était recherché. Deux de mes fils, Daniel et Pierre, étaient engagés dans un groupe de mennonites pour la paix. C'est par ce biais qu'on nous a sollicités pour accueillir un réfugié. Musey, sa femme, ses deux tout jeunes enfants et un fils adoptif sont restés chez nous neuf mois.

La famille Musey monte dans l'hélicoptère (Photo : RTS Screenshot*).

Opposant notoire au régime de Mobutu, il aurait risqué sa vie en rentrant chez lui. Il était membre du gouvernement clandestin prêt à renverser l'ancien dictateur.  (…) De toute façon, avec le temps, notre ferme n'était plus sûre. Peu avant Noël, Musey avait trouvé une autre cachette. Mais à l'insistance de son épouse, il était revenu chez nous pour les fêtes. C'est ainsi que la police a pu l'attraper. Après cette affaire, il y a eu une action en justice contre nous. Nous avons dû payer une amende.

Mais nous ne regrettons rien, même si, au sein de la communauté mennonite, on nous a reproché d'avoir caché des clandestins. C'était notre devoir de chrétiens de les accueillir. D'autant plus que nos propres ancêtres anabaptistes étaient eux aussi souvent en fuite. Beaucoup d'eux furent également déportés. Et beaucoup n'ont survécu que parce que des gens leur ont offert un abri - sans poser beaucoup de questions. Ainsi, les Burkhalter ont également trouvé asile dans le Jura au 18e siècle. Maintenant, c'était à nous d'aider les autres. Par gratitude pour l'aide qui avait souvent sauvé la vie de nos ancêtres !"

L’affaire Mathieu Musey

C'est dans la ferme de la famille mennonite Burkhalter que l'un des réfugiés les plus célèbres de Suisse, Mathieu Musey, a trouvé refuge avec toute sa famille d'avril 1987 à janvier 1988. Et c'est à la ferme Mont-Dedos au-dessus des gorges du Pichoux aussi qu'il sera arrêté lors d'une opération de la police bernoise, le 7 janvier 1988, opération qui conduira à l'expulsion manu militari de la famille Musey vers le Zaïre (aujourd'hui République démocratique du Congo). Homme érudit, bardé de diplômes, établi depuis 17 ans en Suisse, Musey avait enseigné dans plusieurs universités avant de voir sa demande d'asile rejetée par la Confédération. A l'époque des faits, il était secrétaire exécutif de la Coordination de l'opposition zaïroise en Suisse et ministre du gouvernement en exil. Alors que son arrestation avait fait grand bruit, Mathieu Musey a publiquement dénoncé «l'enlèvement grassement monnayé entre le ministre de la Justice helvétique (Elisabeth Kopp) et le président Mobutu» dont il aurait été victime.

Mathieu Musey est mort à Kinshasa en février 2021 à l’âge de 80 ans.


Selon l'article du journal «Onze enfants, une équipe de foot à nous tout seuls!» von Catherine Favre in ArcInfo 200
Article de la Télévision Suisse Romande TSR «L’affaire Musey» in der Sendung «Temps présent» du 3 mars1988.

Autres sources: Catherine Favre in ArcInfo 2007.